lundi 12 novembre 2012

La bizarrerie du brocoli et les vertus des cailloux

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Portrait automnal du jardin en fin de course,
Émergeant des nids de mes abeilles creusés dans le bois, des cosmos poussent.


Hélène :
Alors que l'automne fait ressortir l'âme poétique de plus d'un jardinier, ce qui me porte à écrire aujourd'hui est une découverte fort intéressante : Il s'agit des brocolis et de leur bizarreries. Chacun connaît bien ce légume et, après les épinards de Popeye, c'était probablement la deuxième verdure la plus souvent servie chez moi durant mon enfance. Mais l'avez-vous essayée au jardin?
Vous pouvez voir, ici, 
où la première tête a été coupé et pourtant,
 vous voyez d'autres bouquets!
Cette année fut ma première expérience et voici une belle révélation qui vous fera peut-être, vous aussi, l'essayer dans les prochaines années. C'est une hydre, ce légume. Si, si! On coupe la première tête et d'autres, plus petites, apparaîtront dans les semaines suivantes! J'ai failli manquer ça car, après avoir cueilli les premières têtes, je me suis dit qu'il valait mieux enlever entièrement le reste des plants, que c'était la fin de toute façon. Heureusement, par ma paresse (et un voyage de deux semaines sur un autre continent), la tâche n'a pas été faite, ce qui fait qu'à mon retour, la surprise des nouvelles têtes de brocoli m'attendait à travers des vignes de concombres qui jaunissaient.

Concombres? Que si! J'ai planté les concombres au travers des brocolis. Ils se sont hissés à travers le feuillage bleuté et enfin sur les baguettes de bambou que j'avais plantées ici et là. Les deux fonctionnent très bien ensemble donc!

Le brocoli n'est pas toujours un légume facile à faire pousser. Louise n'a pas eu de chance cette année et n'a eu que de la feuille. Heureusement, les feuilles sont délicieuses et elle les a donc mangées! Pour ma part, j'ai tenté une petite expérience qui est peut-être en partie responsable de la vigueur de mes 3 plants. D'abord, je les ai commencés en semis, à l'intérieur. Or, dans un petit pot de transplantation, il y avait deux vigoureux plants et je n'ai pas eu le coeur d'en détruire un des deux. Mais quand est venu le temps de les transférer, ils étaient vraiment trop proches. La solution m'est venue de Ray Browning ( Chaîne You Tube : Praxxus 55712). J'en profite ici pour vous expliquer sa méthode originale en quelques phrases : il transplante ses jeunes plants de tomates à plusieurs reprises, 2 ou 3 ensemble, dans un pot de plus en plus grand et profond. Il fait ployer les tiges de chaque plant pour les éloigner les uns des autres et les maintient en place en ajoutant graduellement du terreau à son pot. De cette façon, il enterre graduellement les plants à mesure qu'ils grandissent, jusqu'à ne laisser que quelques centimètres de chaque plant dépasser au-dessus du terreau. Le pot se retrouve rempli peu à peu. Noter qu'il élimine toutes les feuilles qui se retrouveraient sous terre en les coupant au ras de la tige principale. Le but recherché ici est d'enterrer graduellement la tige principale pour l'encourager à augmenter son réseau de racines et faire ainsi des plants plus forts. Quant à laisser plus d'un jeune plant par pot, Ray s'est simplement rendu compte qu'il n'est pas nécessaire de sacrifier un des plants si on les éloigne graduellement les uns des autres.

S'il pouvait espacer de jeunes plants de tomates, pourquoi ne pourrais-je le faire pour des brocolis? J'ai utilisé sa technique au moment de transférer mes plants dans le jardin : J'ai ployé les tiges pour éloigner les plants, je les ai enterrés avec un mélange de fumier et de terre à jardin et, pour tenir le tout en place, j'ai déposé une grosse pierre juste entre les plants.

Cette pierre a d'abord servi à éloigner les plants l'un de l'autre et à les tenir en place, mais elle a offert un autre avantage, probablement plus grand encore. (Je vous offre ici ma théorie, car  ce n'est pas cet unique test qui peut en démontrer tous les bienfaits.) Il est connu en jardinage qu'on peut utiliser la masse thermique d'un objet (une roche, comme ici, ou encore du gravier ou même un point d'eau) pour accumuler la chaleur durant le jour et la relâcher durant la nuit. Ceci a pour effet de garder la plante à une température plus stable. Bien sûr, le brocoli est un légume qui aime bien la fraîcheur, mais j'ai quand même l'impression que pour n'importe quelle plante, une température la plus constante possible est bien meilleure que les variations que nous avons subies cet été. 

D'ailleurs, nous pourrions pousser le principe de masse thermique, un principe important en permaculture, bien plus loin que l'application d'une roche au pied d'un plant de brocoli. Nous pouvons l'utiliser pour allonger la saison des tomates vers la fin de l'été, par exemple. Un jardinier pourrait aussi mettre à profit la chaleur d'un patio en ciment en plantant tout juste à côté. Pareillement, placer des plantes plus tendres tout près des fondations de la maison pourrait leur permettre de mieux survivre à nos hivers. Sepp Holzer utilise aussi ce principe pour faire pousser toutes sortes de plantes plus tendres tout contre des rochers en terrain montagneux où les hivers sont rigoureux !

En bout de ligne, cette expérimentation m'a ouvert l'esprit sur la variété de méthodes qui sont à notre disposition au jardin. Alors, je peux bien remercier mes plants de brocolis, car c'est justement leur bonne performance (ou leur bizarrerie) qui m'a amenée à me poser des questions sur les vertus de ma pierre. Celle-ci n'a peut-être pas été utilisée au maximum de son potentiel puisque les brocolis ne sont pas si frileux, mais cela m'a tout de même donné ma première leçon pratique en matière de "technologie thermique" et j'en suis heureuse. Ce sera sûrement un apprentissage qui sera appliqué dans les années à venir!