lundi 30 septembre 2013

Des vertus du plantain et de la cohabitation avec les guêpes

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Louise :

La plupart du temps, le plantain (Plantago), tout comme les guêpes, suscite des réactions négatives. D'un côté, une mauvaise herbe agressive que l'on retrouve souvent dans les fissures du ciment ou de l'asphalte en milieu urbain, de l'autre une bestiole dont la piqûre est potentiellement mortelle pour les personnes qui y sont fortement allergiques. Leur sort devrait donc être réglé rapidement : ce sont deux nuisances, n'est-ce pas ?
Plantain majeur (Plantago Major en latin - Broadleaf Plantain o Greater Plantain en anglais, Llantén Mayor en espagnol). On le voit pousser ici à travers l'herbe et le trèfle. Ses tiges de graines et ses grandes feuilles lustrées en forme de cuillère sont bien visibles.

Oui, mais la réalité n'est pas aussi tranchée que ça, bien sûr. Le plantain a le défaut, impardonnable pour certains, de chercher à coloniser tous les coins de pelouse, avec enthousiasme et rapidité. Il a aussi la précieuse qualité de s'offrir à portée de main comme médicament de premiers soins d'une efficacité redoutable contre les piqûres de guêpes, de moustiques et d'abeilles, sans compter les irritations cutanées dues à l'ortie (Urtica) ou à l'herbe à puce, par exemple.

On voit bien ici la tige parée de
graines presque prêtes pour une
potentielle récolte.
J'en ai fait l'expérience personnelle cet été, quand j'ai eu le malheur de piétiner un nid de guêpes de terre, par inadvertance. D'abord, je me suis éloignée assez vite pour limiter les dégâts à une seule piqûre sur un doigt. Ensuite, je me suis vite mise à la recherche de plantain. Comme notre gazon n'a rien à voir avec les pelouses de golf à part la couleur, je n'ai pas eu de mal à localiser un plant et à en prélever deux feuilles m'apparaissant propres. Je les ai essuyées de la main et de la manche, je les ai pliées en trois ou quatre et je les ai enfournées dans ma bouche, pour les mâcher grossièrement.

Puis j'ai réarrangé les feuilles mâchées pour en faire un cataplasme que j'ai rapidement appliqué sur la région de la piqûre. La douleur a diminué instantanément, à mon grand soulagement. J'ai gardé les feuilles en place pendant une trentaine de minutes, humblement reconnaissante de mon confort si vite retrouvé. Par la suite, la douleur qui m'est restée était vraiment bénigne, comme un simple rappel de ne pas retourner tout de suite dans le coin de jardin où ma mésaventure s'était produite.

Les guêpes quant à elles, tout comme les abeilles, ont un rôle important à jouer comme insectes pollinisateurs. De plus, les guêpes sont prédatrices de plusieurs espèces d'insectes considérées nuisibles par les jardiniers. Certaines espèces sont chasseuses, d'autres sont parasites en pondant leurs oeufs dans le corps d'autres insectes (si ceci vous intéresse, voir cet article). Mais quand on vient de subir leur piqûre,c'est leur côté nuisible qui se présente à nous et c'est précisément à ce moment que le plantain vient à notre rescousse. 
Hélène : Le plantain est peut-être considéré comme une mauvaise herbe
car peu importe s'il s'agit d'un environnement de campagne ou urbain,
il pousse partout. Dans les rues de Montréal, s'il y a une fissure, ce sera
probablement la première plante à s'y installer. Voyez ici comme elle
s'entend bien avec le pissenlit, l'hémérocalle et la glissoire de fiston.
Je suis parfois ambivalente quand il s'agit d'opter pour la destruction des nids de guêpes ou pour la cohabitation pacifique. Après tout, il y a toujours une part de risque à partager un territoire avec des bestioles si douées pour se défendre. Mais je dois dire que les pires mésaventures que moi et ma famille aient connues se résument à une, deux ou trois piqûres à la fois, même en ayant abandonné d'urgence la tondeuse à gazon, moteur en marche, directement au-dessus d'un nid.

Jusqu'à présent, je détruis le nid si : 
- il est situé sous terre dans un endroit passant;
- il est accroché à la structure d'un bâtiment ou d'une structure quelconque et que les occupantes seront dérangées par les vibrations occasionnées par des chocs (comme une porte qu'on ouvre et qu'on ferme ou des coups de marteau) ou par le passage rapproché d'humains ou d'animaux;
- le site est fréquenté par des enfants ou des visiteurs à proximité; 

Je laisse les guêpes en paix si leur nid est dans un endroit retiré ou non passant.

Quant au plantain, son utilité ne s'arrête pas là. 
- On peut en manger les jeunes feuilles au printemps, crues pour agrémenter une salade, ou cuites à la manière des épinards.
- On peut faire sécher les feuilles, les entreposer au sec, puis les humecter pour en faire des cataplasmes pour soigner les maladies de peau, les éraflures et les coupures. Les racines s'utilisent aussi dans le même but.
- On peut infuser les feuilles une demi-heure dans l'eau bouillante pour en faire une tisane vitaminée.
- On peut récolter les graines et les moudre pour les ajouter à la farine de crêpe ou de pain, ou encore on peut donner ces graines aux oiseaux de volière ou de basse-cour, ils en raffolent. Les graines ont un certain effet laxatif.
-  Enfin, on peut tout simplement tolérer cette plante dans notre pelouse, car elle accumule le potassium, le calcium et le soufre, dont elle enrichit le sol lorsqu'elle meurt. 

Hélène : Les guêpes ont tendance à être plus agressives que les abeilles. Une des raisons c'est que les abeilles, lorsqu'elles piquent, doivent arracher leur dard, ce qui déchire leur abdomen et qui provoque leur mort. Une guêpe, quant à elle, peut piquer autant qu'elle le veut. Alors à moins que l'abeille ne sente vraiment son nid menacé, elle ne piquera pas, car il s'agit vraiment d'un acte de dernier recours, c'est pour cela que je laisse bien vivre les abeilles qui sont aux abords de mon jardin. Dans les 5 années de cohabitation, et bien que je me sois appuyée de nombreuses fois directement sur leur nid dans le bois, je n'ai jamais reçu une seule piqûre. J'en parle dans cet article.

Ce superbe nid, fait d'une pâte de bois mâché, est la demeure de guêpes à taches blanches (Dolichovespula Maculata - White-faced hornet en anglais). Leur tête présente les taches et leur abdomen est rayé de noir et blanc. Il a grossi tout l'été, en abord de notre jardin. À l'hiver, seules survivront la reine et les jeunes femelles fécondées. Au printemps, le nid sera abandonné et chaque survivante partira en quête d'un site pour bâtir un nouveau nid, même la reine-mère.